Nos femmes françaises, la guerre les a magnifiquement agrandies, comme nos soldats, et, dans tous les mondes, la plupart se révèlent sublimes.
Paysannes, à la charrue ou aux moissons, s’efforcent avec un inlassable courage de suffire aux plus rudes besognes, aussi bien les aïeules, toutes ridées et courbées, que les jeunes, apportant parfois aux champs un petit bébé dans ses maillots, qu’elles posent endormi sur l’herbe. Elles labourent la terre, elles fauchent les épis, tout cela pour que le fils ou l’époux, s’il revient de l’abominable tuerie allemande, trouve la petite propriété bien entretenue, en même temps que la maison bien en ordre.
Et, tout en haut de l’échelle, — pour parler comme les gens qui admettent encore des distinctions sociales, — les élégantes, même celles qui furent des oisives et des frivoles, aujourd’hui quittent leur luxe ; pour tout donner, elles se privent de ce qui leur semblait essentiel, et elles peinent avec joie à des travaux dont elles se croyaient si incapables ! Dans leur blouse d’infirmière, nuit et jour elles s’épuisent au chevet des blessés, mettant leurs mains blanches à des épreuves naguère bien inattendues, et, devant les obligations les plus répugnantes, elles gardent le joli sourire qui enchante les agonies.
Aux abords des gares, par où l’on s’en va sur le front, c’est là peut-être que je les ai vues, plus que partout ailleurs, nobles et touchantes, nos femmes françaises, même les plus humbles d’entre elles. Quand, après une courte permission, le mari, en capote bleue glorieusement fanée, s’en retourne là-bas, dans la géhenne de feu, l’épouse vient, avec les enfants, le reconduire ; presque toujours c’est lui, le soldat, qui tient le plus petit à son cou, tout contre sa joue, jusqu’à la minute de l’inexorable départ. Et après l’adieu, qui pourra être le dernier, la femme s’en retourne au logis, fière, avec des yeux de suprême angoisse, mais qui ne veulent pas pleurer.